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Des précisions sur le changement de statut fiscal des associés de SEL

Author:
Philippe ISNARD
Published:
May 27, 2024

En novembre dernier, je vous avais fait part d’une modification importante qui allait impacter les associés de SEL. Depuis lors l’Administration fiscale a quelque peu précisé sa position en la matière.

Pour rappel, la nouvelle règle fiscale veut qu’à compter de l’imposition des revenus 2024, les rémunérations perçues par l’associé de société d’exercice libérale au titre de son activité libérale au sein de celle-ci sont imposables à l’IR dans la catégorie des BNC (CGI, art. 92-1) ; sauf dans le cas où il peut être montrer l’existence d’un lien de subordination de l’associé à l’égard de la société dans laquelle il exerce son activité.

Face à ce changement radical de doctrine, l’administration fiscale avait été quelque peu diserte sur la mise en application pratique pour les praticiens concernés. Quelques précisions ont été apportées récemment dont voici un résumé.

  • Distinction des rémunérations : si les activités techniques sont imposables au titre des BNC, les activités de direction ou de gérance sont elles imposables soit au titre des Traitements et salaires (art. 80-ter du CGI) soit au titre des Allocations de gérance majoritaires (art. 62 du  CGI) selon le cas. A titre pratique, il est admis que 5 % du montant de la rémunération d’ensemble perçue par les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA correspondent aux revenus afférents à leurs fonctions de gérant, imposables dans les conditions de l’article 62 du CGI. Cette règle pratique s’applique « qu’il soit possible de les distinguer ou non de la rémunération technique ». Ainsi la rémunération de l’activité libérale représenterait 95 % de la rémunération totale sauf ventilation différente justifiée pleinement à l’administration fiscale par l’intéressé. Sur le sujet, l’administration rappelle que les rémunérations des fonctions de gérant se rapportent aux tâches qui ne sont pas réalisées dans le cadre de l’activité libérale, comme la convocation d’assemblée, la représentation de la société dans les rapports avec les associés et à l’égard des tiers, la décision de déplacement du siège social de la société. A l’inverse les tâches de nature administrative inhérentes à l’exercice de l’activité libérale telles que la facturation du client ou du patient, l’encaissement, les prises de rendez-vous, les approvisionnements de fournitures, la gestion des équipes ou la rédaction de documents tels que des ordonnances de prescription ne sont pas considérées comme des tâches relevant de l’activité de gérance.
  • Immatriculation de l’associé : Cette immatriculation sera faite auprès du service des impôt des entreprises (SIE) dont dépend l’associé en vue de permettre la télédéclaration de ses résultats. Le SIE devra bien distinguer le statut spécifique de l’associé de SEL relevant des BNC au titre de son activité libérale au sein d’une société  (ni TVA, ni CFE), du statut « normal » des titulaires de BNC exerçant une activité libérale directe propre.
  • Micro-BNC : si l’associé de la SEL déclare percevoir des revenus inférieurs à 77 700 € , il peut bénéficier du régime micro-BNC à compter de l’imposition de ses revenus 2024, sachant que la notion de revenus s’entend comme la somme de la rémunération versée par la SEL et des dépenses professionnelles incombant à l’associé mais prises en charge par la SEL. Il porte directement le montant de ses recettes annuelles HT sur sa déclaration des revenus n° 2042 C-PRO. Il bénéfice d’un abattement de 34 % pour frais calculé sur le montant des recettes déclarées.
  • BNC : L’associé de SEL relevant du régime de la déclaration contrôlée de plein droit ou sur option déclare son résultat annuel sur la déclaration n° 2035-SD récapitulant la rémunération totale perçue, les charges sociales obligatoires et facultatives déductibles, ainsi que les frais professionnels directs tels que les frais de déplacements et les frais supplémentaires de repas.  Le résultat déclaré est reporté sur la déclaration n° 2042 C-PRO.
  • Charges  déductibles : Les dépenses acquittées par l’associé au cours de l’année d’imposition et nécessitées par l’exercice de ses fonctions techniques au sein de la SEL sont déductibles de ses recettes dans les conditions de droit commun. Elles incluent donc naturellement les cotisations obligatoires d’assurance maladie et de maternité, les cotisations d’allocations familiales et d’invalidité-décès ainsi que les cotisations versées au titre des régimes obligatoires de base d’assurance vieillesse. Les cotisations acquittées au titre des régimes facultatifs d’assurance vieillesse, de prévoyance ou perte d’emploi dans le cadre des contrats Madelin sont tout aussi déductibles dans les limites énoncées au sein  de l’art. 154 bis du CGI. A l’inverse, les frais exposés en lien avec la clientèle sont en principe imputables sur le résultat de la SEL car c’est bien cette dernière qui est légalement en charge de l’activité exercée.  
  • TVA : Les SEL sont seules redevables de la TVA au titre des sommes encaissées auprès de la clientèle. Même si elles sont imposables dans la catégorie des BNC, les rémunérations des fonctions techniques perçues par les associés de SEL n’entrent pas dans le champ d’application de la TVA.
  • Epargne salariale : les associés de SEL s’ils ont le statut de présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire de la société pourront continuer à bénéficier de ces régimes dans les conditions énoncées par la loi.

Bien entendu, dans les faits, les situations réelles d'associés de SEL pourront être plus complexes et demanderont un examen minutieux et plus approfondi.