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Terres rares : le vrai nerf de la compétition mondiale

Author:
Philippe ISNARD
Published:
December 3, 2025

Aujourd’hui, nous allons parler d’un sujet essentiel pour comprendre les tensions économiques et géopolitiques actuelles : les terres rares.
Ces 17 métaux sont devenus indispensables à notre économie, à nos technologies…et à la sécurité nationale des grandes puissances.

Fin octobre 2025, lorsque les États-Unis et la Chine ont conclu une trêve commerciale d’un an, un point était au centre des discussions: le contrôle des exportations de terres rares. La Chine venait d’annoncer de nouvelles règles limitant l’octroi de licences pour ces matériaux stratégiques. Sous pression internationale, elle a accepté de suspendre temporairement ces restrictions, mais sans renoncer à sa position dominante.

Cette trêve illustre une réalité simple : les terres rares sont devenues un instrument géopolitique, un levier majeur dans la rivalité technologique entre les deux plus grandes puissances mondiales.

Contrairement à leur nom, les terres rares ne sont pas si rares. Mais leur extraction est complexe, coûteuse et excessivement polluante. C’est là que la Chine a joué un rôle déterminant. Dès les années1980, Pékin a investi massivement dans cette industrie, profitant de coûts de production faibles et d’une stratégie industrielle de long terme. En 1987, DengXiaoping résumait déjà ce rapport de force : « Le Moyen-Orient a du pétrole,la Chine a des terres rares. »

Aujourd’hui, la Chine contrôle plus de 90 % de la production et surtout du raffinage mondial. Ce monopole ne repose pas sur la géologie, mais sur la maîtrise industrielle, sur l’avance technologique et sur des décennies de politique publique cohérente.

Ces métaux entrent dans toutes les technologies modernes :

  • véhicules électriques,
  • éoliennes, batteries et équipements de transition énergétique,
  • robotique et informatique avancée,
  • technologies d’intelligence artificielle,
  • systèmes de guidage, capteurs, radars,
  • drones militaires, avions de chasse de dernière génération comme le F-35.

Autrement dit, sans terres rares, pas d’IA, pas de transition énergétique, pas de défense moderne. Elles se trouvent à la croisée de trois enjeux majeurs : énergie, industrie, sécurité nationale.

Pendant longtemps, États-Unis et Europe ont considéré les terres rares comme un sujet secondaire. Le raffinage chinois, moins coûteux, a éliminé toute concurrence internationale.

Mais avec la montée de l’IA, l’électrification massive des économies et les tensions géopolitiques, cette dépendance est devenue un risque stratégique majeur. Depuis 2025, face aux nouvelles restrictions chinoises, les États-Unis, l’Union européenne, le Japon et l’Australie ont lancé :

  • des financements publics,
  • des incitations fiscales,
  • des partenariats stratégiques,
  • et des programmes de relocalisation industrielle.

Les gouvernements veulent sécuriser des chaînes d’approvisionnement alternatives. Un exemple fort : le ministère américain de la Défense a acquis une participation dans MP Materials pour relancer la production nationale.

Malgré l’effort mondial, développer de nouvelles capacités n’est pas simple. Le secteur reste exposé :

  • aux risques géopolitiques,
  • aux changements réglementaires,
  • à l’instabilité des pays producteurs,
  • aux complexités environnementales,
  • à des technologies encore peu éprouvées,
  • et à des délais d’autorisation très longs.

C’est pourquoi la dépendance à la Chine demeure, malgré les efforts de diversification.

Les terres rares sont devenues le cœur technologique de l’économie moderne et un enjeu majeur de souveraineté. Qu’il s’agisse d’intelligence artificielle, de transition énergétique ou de défense, ces 17métaux continueront d’être au centre des stratégies industrielles et géopolitiques des grandes nations dans les décennies à venir.